Je suis un grand fan de Conan et de l’œuvre d’Howard dans son ensemble. Mon entrée dans cet univers s’est fait par le biais du jeu de plateau Conan de l’éditeur Monolith. Celui-ci lançant une nouvelle campagne de financement, je voulais marquer l’occasion d’une petite fanfiction maison.
Je vous laisse donc en compagnie de notre héros au fin fond du terrible désert de Stygie.
Auteur : Pascal Vanpée
Illustration : NightCafé
Attention : certains récits peuvent contenir des scènes de violence modérée ou des éléments qui pourraient choquer de jeunes lecteurs. Il est recommandé de les lire à partir de 16 ans.
Les derniers rayons du soleil dardaient par-dessus la dune et faisaient briller de mille feux les sables du désert stygien. Les mercenaires s’extirpaient lentement de sous leurs abris de fortune, le regard rendu vague par la privation de sommeil. Les hommes de garde s’affairaient à allumer des feux autour desquels des outres d’hydromel commençaient à circuler de mains en mains.
Tous se préparaient à une nuit en enfer.
Ils savaient lorsqu’ils s’étaient engagés que les risques étaient à la hauteur des gains. Mais à ce moment, seule la promesse de trésors inestimables avait enflammé leur esprit. Ils avaient fêté des jours durant, cette aubaine et la nouvelle vie qui en découleraient.
De nouvelle vie, il n’en était plus question. À présent, survivre une nuit de plus relevait du miracle.
– Le capitaine et le lieutenant auraient trouvé l’entrée du tombeau cet après-midi, affirma un guerrier à la peau de bronze et aux yeux d’amandes.
– Ce n’est pas trop tôt, grommela le géant aux cheveux noirs à qui il venait de tendre l’outre, il est temps qu’ils trouvent ce trésor et que nous quittions cette maudite géhenne, par Mitra.
Le premier reprit la parole.
– Pourquoi, l’homme, tu as peur de mourir ici ?
– Moi, peur de mourir, rugit le colosse, ne m’insulte pas. J’ai vu des horreurs bien plus grandes et faits face à la mort plus souvent que vous tous réunis. La mort, je trinque avec elle.
Sur ces mots, il dressa l’outre, suscitant des acclamations de joie autour du feu.
– Si tu es un guerrier si puissant, nous devrions te connaître. Quel est ton nom, l’homme ?
Plantant ses yeux dans ceux en amandes de son interlocuteur, ce dernier déclara avec aplomb : « Je suis Conan le Cimmérien. »
Des murmures respectueux se répandirent autour du feu, tant la légende du barbare le précédait.
– Et qu’est-ce qui nous prouve que tu nous dis la vérité, Conan le Cimmérien ?
La remarque venait d’un mercenaire taciturne qui se tenait perpétuellement en retrait, un casque à corne vissé sur la tête.
– Lève-toi et mon acier te le prouvera !
L’invitation resta sans réponse alors que l’assemblée approuvait d’un mouvement de tête l’identité de leur compagnon. La présence d’un pareil héros dans leurs rangs leur rendait un peu d’espoir.
***
La nuit tint ses promesses.
Dès le soleil couché, les premiers guerriers squelettes, aux armes et armures de bronze oxydé, s’extirpèrent des sables de la dune. Les hordes de morts vivants, mus par une magie impie, se précipitèrent aussitôt à l’assaut du camp retranché des mercenaires.
Comme chaque nuit, ceux-ci les accueillirent de leurs lames. Leur expérience et leur compétence dans l’art de la guerre dépassaient de loin celles de leur adversaire décérébré. Chaque nuit, ils fauchaient des centaines de squelettes, brisant les os et les crânes jusqu’à ce que l’aube pointe. Malheureusement, au fil des heures, la fatigue s’emparait d’eux. Les coups devenaient moins précis et des brèches apparaissaient dans les défenses, autant d’erreurs immédiatement sanctionnées par la mort de l’un d’eux. Cela durait depuis des semaines et leur nombre ne faisait que diminuer alors que les morts-vivants semblaient innombrables. Leur seul salut résidait dans la découverte des trésors enfouis de cette antique civilisation suivie d’une retraite qui s’annonçait périlleuse.
La situation en était là, lorsqu’à l’insu de tous, le sable se creusa au centre du campement. Il s’agissait d’abord d’un petit trou, guère plus grand qu’un casque retourné. Mais rapidement, celui-ci prit des proportions impressionnantes, aspirant quelques hommes dans les entrailles du désert. En premier, surgit de ce gouffre béant un torse titanesque et momifié orné d’une tiare de bronze ouvragé. Ensuite de puissantes ailes d’aigles aux plumes éparses et desséchées extirpèrent le corps gigantesque de taureau décharné du sable. Le Lamassu s’abattit dans le dos des défenseurs dans un silence d’outre-tombe.
Un cri d’effroi, aussi strident qu’aigu, sortit de la gorge du mercenaire aux cheveux noirs. Tous les combattants restèrent pétrifiés, sauf un.
L’homme au casque à cornes ramassa une lance de bronze et se précipita vers le monstre nécrotique en déclarant à l’attention de tous : « Conan l’imposteur vient de souiller ses bandes molletières. »
Un fou rire parcourut les lignes et brisa la peur. Chacun reporta son attention à l’ennemi et reprit sa lutte pour la survie.
Mais nul ne put empêcher le carnage d’avoir lieu.
***
Le camp n’était plus qu’un champ de cadavres entre lesquels déambulaient les guerriers squelettes. Ils effectuaient un macabre rituel, inlassablement ; avancer jusqu’à un corps, enfoncer sa lance dans l’abdomen, la retirer, se déplacer jusqu’au corps suivant.
Puis vinrent les premiers rayons de l’aube qui brisa la magie impie. Morceau par morceau, accompagnant la lumière naissante, les morts-vivants retournèrent à leur repos troublé. Quand il fit enfin jour, plus rien ne bougeait là où, il y a quelques heures encore, une lutte sans merci faisait rage. Dans le ciel, les charognards volaient en cercle, s’assurant que tout danger était écarté. Le désert reprendra rapidement ses droits et bientôt, il ne restera plus de trace de l’affrontement ni de ses protagonistes.
Un imposant vautour fauve, plus hardi ou plus affamé que les autres, se posa sur la carcasse proéminente du Lamassu. Un mouvement de l’aile de la créature troubla l’observation du charognard qui plana et se posa quelques mètres plus loin, inquiet. L’homme au casque à cornes repoussa la lourde aile et finit de se dégager. Il constata que du sang avait abondamment coulé de sous son casque avant de sécher sur sa nuque et son épaule. Attrapant ce dernier par les cornes, il le retira délicatement et l’observa. Au vu de son état, l’homme comprit qu’il lui devait la vie.
Il ébouriffa son épaisse chevelure noire et porta son regard bleu perçant sur le charnier. Le temps jouait contre lui et il devait parcourir un maximum de distance avant le crépuscule. Il entreprit à rassembler l’équipement et les victuailles nécessaires à sa traversée du désert.
Un râle attira son attention. Il provenait de sous un amoncellement de plusieurs corps. Après quelques instants d’hésitation, il entreprit de les enlever, libérant le colosse aux cheveux noirs. Il se détourna et poursuivit sa quête d’objets utiles.
– Merci, dit le colosse d’une voix tremblante. Je te dois la vie. Je dois aussi t’avouer que je n’ai pas été honnête avec toi.
« Je sais », grogna l’autre sans même lui adresser un regard.
– Je vous ai menti sur mon identité. Je ne suis pas Conan le Cimmérien.
L’homme se retourna et traversa l’espace qui les séparait en quelques enjambées. Il le darda de son regard de glace avant de répondre, la mâchoire tendue :
– Je sais ! Et si je te reprends à utiliser mon nom, je te tue de mes propres mains.
Chargeant son barda sur son dos, Conan poursuivit : « Rassemble ton matériel, nous avons peu de temps et beaucoup de distance à parcourir. Je ne t’attendrai pas ! »
À ces mots, il démarra à petite foulée vers la dune et le soleil levant.
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